Published On: 7 janvier 2022Categories: A savoir, Acutalités

En octobre 2020, la proposition de loi « Gaillot », après avoir été adoptée à l’Assemblée nationale avait été rejetée au Sénat. Elle est revenue en force dans l’actualité en novembre dernier, soutenue et appuyée par Christophe Castaner, chef de la majorité LREM à l’Assemblée nationale et le ministre de la santé Olivier Véran. Le Président Macron, quant à lui tient une position plus qu’ambiguë, il aurait apporté son soutient à Albane Gaillot tout en redisant son opposition à l’allongement du délai légal de l’avortement de 12 à 14 semaines : « Je n’ai pas changé d’avis. Des délais supplémentaires ne sont pas neutres sur le traumatisme d’une femme. Après je respecte la liberté des parlementaires. »

Après être passée en seconde lecture à l’Assemblée Nationale le 29 et 30 novembre dernier, la proposition de loi visant à renforcer le droit à l’avortement sera examinée au Sénat le 19 Janvier 2022 en seconde lecture « à la demande du gouvernement ». L’examen en commission quant à lui est prévu le 12 janvier.

Elle s’inscrit dans un contexte français et européen virulent en faveur de la promotion de l’avortement. L’idéologie est telle que l’avortement est abordé par le seul prisme du « droit des femmes », en évacuant totalement le droit de l’embryon et de l’enfant à naître. Certains comme Clément Beaune, (secrétaire d’état aux affaires européennes) souhaitent intégrer l’avortement au « socle des droits fondamentaux » et en faire une valeur de l’Europe. Plusieurs pays membres : la Pologne et la Hongrie qui ont récemment restreint le droit à l’avortement ont été la cible de violentes critiques et ont reçus de nombreuses pénalités et intimidations de la part de l’Europe.

Rappelons que l’avortement ne concerne pas seulement les femmes, mais aussi les pères, les professionnels de santé et bien sûr et avant tout l’être humain qu’est l’embryon.

Quelles sont les dispositions de la proposition de loi Gaillot ?

  • L’allongement du délai légal de l’avortement de 12 à 14 semaines,
  • L’allongement du délai de l’avortement médicamenteux à 7 semaines,
  • Le droit d’être informé et de choisir sa méthode pour avorter,
  • La suppression de la clause de conscience spécifique à l’IVG,
  • La suppression du délai de réflexion de 24h avant un avortement,
  • Le tiers payant généralisé pour l’IVG,
  • L’IVG instrumentale pour les Sages-Femmes à titre pérenne et meilleure rémunération de l’acte,
  • Un répertoire recensant les professionnels de santé et établissement pratiquant l’IVG par le biais des ARS, disponible pour tous par tous les moyens,
  • L’extension de l’interdiction du refus de soins pour discrimination à la contraception d’urgence,
  • La remise de rapports par le gouvernement au parlement relatif au délit d’entrave à l’IVG et à l’accès des femmes à l’IVG.

Article 1ier : Extension du délai légal de l’IVG de 12 à 14 semaines de grossesse.

Laurence Rossignol a avancé le fait que la limite des 12 semaines pour avorter ne respecte pas l’autonomie des femmes. Cette notion reste bien floue et n’est pas détaillée, on ne sait pas s’il s’agit d’une autonomie physique, psychique, sociale ou juridique. S’il s’agit de la capacité des femmes à prendre une décision et assumer pleinement les conséquences de leurs actes, alors on ne comprend pas pourquoi la limite des 12 semaines est un problème.

Cette demande pose question : aujourd’hui 14 semaines, mais demain 16 ou 20 semaines ?

D’ailleurs, la voie de nombreux professionnels de la santé, qui ne sont pourtant pas opposés à l’avortement, s’est élevée au sujet de cet allongement du délai légal de l’avortement de 12 à 14 semaines. A l’unanimité, le collège national des gynécologues et obstétriciens français a opposé son ferme désaccord :

« Le geste de l’IVG chirurgical entre 14 et 16 semaines d’aménorrhée change de nature. À 14 SA, une aspiration du contenu utérin est encore possible. À 16 SA, il est nécessaire de dilater davantage le col utérin au risque de créer des lésions définitives, pouvant être responsables d’accouchements prématurés ultérieurs. Les gestes nécessaires au-delà de 14 SA peuvent donc être sources de complication pour les femmes et leur pénibilité pourrait entrainer une désaffection des professionnels de santé qui réalisent aujourd’hui (à l’instar de ce qui s’est produit lors du précédent allongement de 12 à 14 SA en 2001) […] Aucune femme ne demande ni n’espère, une IVG tardive. […] Augmenter le délai légal parce qu’on ne peut pas recevoir les femmes au moment de leur demande, est-ce améliorer le droit des femmes ? C’est au contraire proposer un geste plus compliqué et plus risqué. »

Son président lui-même, le Professeur Israël Nisand, insistait sur la problématique de l’acte chirurgical de l’avortement à 14 semaines.

« La tête du fœtus est ossifiée et il faut l’écraser ». Il ajoute également : « Plus on fait l’IVG tardivement, plus il y a des risques et plus elle est difficile à réaliser »

Quant au sénateur et médecin de formation Alain Milon, il a précisé que : « de 12 à 14 semaines, on passe de l’embryon au fœtus avec le développement du système nerveux central ».

La Marche pour la Vie s’oppose fermement à cette proposition de loi qui représente de nouveau une attaque contre la vie naissante. Mais elle redit également sa totale opposition à la loi Veil qu’elle considère comme la source de toutes les dérives (PMA, GPA, allongement des délais légaux).

L’extension de ce délai répondrait à une demande des femmes. Il est permis de douter de cet argument. En effet, en France, seulement 5% des femmes avortent dans les 2 dernières semaines du délai légal. Or dans la mesure où peu de femmes y ont recours dans les dernières semaines de ce délais légal, combien moins y auront recours si on allonge ce délai.

Rappelons également que les médecins doivent être impliqués dans cette décision d’étendre le délai légal de l’avortement. Les revendications féministes ne peuvent pas être le seul moteur de ce changement législatif.

Article 2, alinéa 1 à 4 : la suppression de la clause de conscience spécifique

Cet article à été amendé lors de la deuxième lecture du projet de loi à l’Assemblée nationale.

Cette disposition prévoyait la suppression de la clause de conscience spécifique à l’avortement et confirme l’obligation du médecin objecteur de lui communiquer immédiatement le nom de praticiens réalisant l’avortement.

L’article supprime également la clause de conscience de la sage-femme et de l’infirmière ainsi que celle des auxiliaires médicaux.

Il existe donc une clause de conscience propre à l’IVG qui protège les médecins et le personnel soignant. Thibaud Bazin, député LR a rappelé que : « La clause de conscience spécifique pose un principe absolu quand la clause générale ne peut pas être invoquée, ou dans celui ou le médecin manquerait à ces devoirs d’humanité ». Quant à la députée non inscrite Emmanuelle Ménard, elle rappelle que cette clause de conscience spécifique est la « condition sine qua non de la constitutionalité de la loi Veil. » De son côté, le comité consultatif national d’éthique a rappelé que ces deux clauses de conscience n’ont pas le même statut juridique : « La clause spécifique peut toujours être aménagée ou supprimée rapidement hors de tout débat public ».

Enfin rappelons que l’avortement n’est pas un acte médical comme un autre, le CCNE l’a bien rappelé le 8 décembre 2021. L’avortement étant en soi « une exception » faite aux les fondamentaux qui soutiennent le respect de la vie humaine rappelée à l’article 16 du code civil. Ce même CCNE met également en garde contre la baisse d’attractivité du métier de gynécologue ou sage-femme.

Ces deux articles de la proposition de loi Gaillot sont les deux dispositions phares. Elle contient cependant de nombreuses autres dispositions qui portent violement atteinte à la vie humaine.

Article 1ier bis : la pérennisation de l’IVG chirurgicale pour les sages-femmes.

En 2020 déjà, la loi de financement de la sécurité sociale pour 2021 a permis aux sages-femmes de pratiquer les IVG chirurgicales jusqu’à 10 semaines de grossesse.

La proposition de loi Gaillot rend donc pérenne la pratique de l’IVG chirurgicale jusqu’à 14 semaines, et l’IVG médicamenteuse jusqu’à 7 semaines de grossesse, pour les sages-femmes.

Cela revient donc à permettre aux sages-femmes de pratiquer un acte pour lequel ils ne sont pas fait. En effet, l’IVG instrumental serait le premier acte chirurgical qu’ils pourraient pratiquer si la proposition de loi est votée. Une lourde responsabilité pour des professionnels qui ne sont pas faites pour pratiquer de la chirurgie, qui plus est de la chirurgie dont le but est de supprimer un être humain. Faut-il rappeler que ce métier consiste à donner la vie, et non pas à la supprimer ? dès lors, permettre aux sages-femmes de pratiquer l’avortement contredirait leur mission première.

Article 1ier Ter A : le tiers payant généralisé

Il prévoyait le tiers payant généralisé avec secret et anonymat de la femme venue avorter.

L’article a été supprimé par la commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale.

Article 1ier ter : la suppression du délai optionnel de 48h.

Il supprime ce qui restait du délai de réflexion avant une IVG, c’est-à-dire 48h. Le but de cet article est de proposer un parcours vers l’IVG accélérée et simplifiée.

Jusqu’en 2016, une femme qui souhaitait avoir recours à l’avortement devait confirmer sa demande 7 jours après le premier entretien avec un médecin ou une sage-femme. Ce délai de réflexion a été supprimé, au motif qu’il était « infantilisant et culpabilisant pour la femme ». Restait donc pour la femme souhaitant avorter un délai de 48 heures pour confirmer sa demande, seulement si elle avait passé un entretient psycho-social avant d’avoir recours à l’avortement. Pour rappel les femmes mineures sont dans l’obligation de suivre l’entretien psychosocial.

Supprimer le délai de réflexion de 48h signifie clairement qu’on ne souhaite pas que la femme réfléchisse, et prenne du recul. Contrairement à ce qui est présenté, la suppression de ce délai est profondément infantilisant pour la femme, et revient à négliger la capacité des femmes à « juger par elle-même de ce qu’elles veulent ». Là où un acte de chirurgie esthétique, même le plus anodin est soumis à un délai de réflexion de 24h, demander une période de réflexion ne reflète pas un manque de confiance dans le patient mais est justifié par le fait qu’il s’agit d’actes graves et irréversibles.

Article 2 alinéa 5 : la création d’un répertoire recensant les professionnels pratiquant l’IVG

« Les ARS aurait à sa charge de mettre jour un répertoire sur le territoire de sa compétence sous réserve de l’accord des praticiens concernés »

On voit bien qu’en établissant un répertoire des personnes qui pratiquent les avortements, les agences régionales de santé pourront donc établir la liste de ceux qui ne le pratiquent pas. Comment ne pas y voir une sorte de surveillance de la part de l’ARS et la constitution d’un fichage de médecins qui seraient ainsi stigmatisés ?

Article 2 bis A : l’obligation de soigner étendue à la contraception d’urgence.

Cet article élargit l’obligation qui incombe aux professionnels de santé de soigner sans discrimination. Il crée une obligation de délivrer la contraception d’urgence, potentiellement abortive, considérant que sa non-délivrance constituerait un refus de soin pour discrimination.

Rappelons que la contraception d’urgence à un effet abortif lorsqu’il y a eu fécondation. Elle ne peut en aucun cas être assimilée à un soin. Les médecins « objecteurs de conscience » se voient désormais dans l’obligation de pratiquer un avortement.

Article 2 bis : la prévision d’un rapport sur le délit d’entrave

Article 2 ter : la prévision d’un rapport sur le dispositif d’accès à l’IVG

Ces deux dispositions montrent :

A quel point le gouvernement promeut l’avortement et veille à améliorer un dispositif qui pourtant relève d’un drame pour la femme.

Il manifeste également la volonté de museler tous ceux qui cherchent à « dissuader » de l’avortement, c’est-à-dire à alerter des risques et enjeux, en cherchant à améliorer le dispositif du délit d’entrave.

On peut donc retenir plusieurs choses de l’examen de la proposition de loi en seconde lecture à l’Assemblée nationale :

  • Tout ce qui était en phase expérimentale devient immédiatement et irrévocablement pérenne : la pratique de l’IVG instrumentale par les sages-femmes et l’extension de l’IVG médicamenteuse à domicile jusqu’à 7 semaines de grossesse.
  • L’engagement courageux de quelques députés qui se sont opposés à une majorité aveuglée par l’idéologie
  • Le soutien du gouvernement, avec la présence dans l’hémicycle d’Oliver Véran, ministre de la santé, qui n’a pas manqué d’être condescendant vis-à-vis de l’opposition, et celle de Christophe Castaner, chef de la majorité à l’Assemblée. On notera la position ambigüe d’Emmanuel Macron.
L'avortement à 14 semaines au Sénat : c'est NON !
Conférence de presse de la Marche pour la Vie, dimanche 16 janvier 2022

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